Montres connectées : peut-on vraiment se fier à leurs mesures ?

Que ce soit pour surveiller sa santé, améliorer ses performances sportives ou suivre son sommeil, les montres connectées sont devenues omniprésentes. Apple Watch, Fitbit, Garmin, Oura, Withings, WHOOP… Ces appareils promettent de nous accompagner dans notre bien-être quotidien avec des données en temps réel. Mais ces chiffres sont-ils vraiment fiables ? Une étude comparative approfondie apporte des éléments de réponse en analysant la précision réelle de ces appareils sur plusieurs paramètres : fréquence cardiaque, dépense calorique, nombre de pas et qualité du sommeil. Voici ce qu’il faut savoir avant de faire entièrement confiance à sa montre.

Fréquence cardiaque : des performances globalement solides

La fréquence cardiaque est l’un des paramètres les plus mesurés et les plus fiables des montres connectées. La majorité des modèles testés affichent une marge d’erreur inférieure à 5 % dans les conditions de repos ou d’effort modéré. L’Apple Watch, par exemple, se démarque par sa précision constante, tout comme la Fitbit Charge HR et certaines montres Garmin. Cependant, la précision peut diminuer pendant les activités physiques intenses, notamment lors de mouvements brusques ou d’exercices impliquant les bras. Des facteurs individuels comme la pigmentation de la peau, le taux de sudation ou l’indice de masse corporelle peuvent également affecter la qualité des mesures.

En résumé, pour une estimation fiable de la fréquence cardiaque au repos ou pendant une marche, les montres connectées sont des outils pertinents. En revanche, pour des entraînements haute intensité ou une analyse clinique fine, mieux vaut se tourner vers un électrocardiogramme ou une ceinture thoracique.

Dépense calorique : une fiabilité très discutable

Lorsqu’il s’agit d’estimer les calories brûlées, la performance des montres connectées chute brutalement. L’étude montre que tous les modèles testés présentent des marges d’erreur supérieures à 20 %, certains allant jusqu’à 90 % d’écart par rapport à la réalité mesurée en laboratoire. L’Apple Watch surestime de 53 %, la PulseOn de 92 %, et d’autres affichent des écarts similaires. Ces erreurs s’expliquent par l’utilisation d’algorithmes propriétaires peu transparents, qui se basent sur des estimations génériques (âge, sexe, taille, activité) plutôt que sur des mesures physiologiques réelles.

En pratique, ces données peuvent induire en erreur les utilisateurs qui cherchent à équilibrer précisément leur apport et leur dépense énergétique. Il vaut donc mieux considérer les calories affichées comme un indicateur de tendance, et non comme une mesure fiable au chiffre près.

Nombre de pas et suivi du sommeil : utiles mais à nuancer

Le comptage des pas est globalement bien maîtrisé par la plupart des montres. La marge d’erreur reste en général inférieure à 10 %, ce qui suffit pour suivre son niveau d’activité quotidienne. Les performances peuvent toutefois varier selon le modèle et la manière de bouger. Certains appareils ont du mal à différencier des mouvements répétitifs du haut du corps (comme cuisiner ou gesticuler) d’une véritable marche.

Côté sommeil, les résultats sont plus contrastés. La détection de l’endormissement est généralement précise (jusqu’à 97 % de fiabilité), mais la détection des réveils nocturnes reste très insuffisante. L’Apple Watch, par exemple, ne détecte que 26 % des éveils réels. De plus, les montres connectées n’ont pas accès aux ondes cérébrales, indispensables pour identifier les phases de sommeil profond ou paradoxal avec exactitude. Le risque est alors de créer une fausse perception de la qualité de son sommeil, voire de générer de l’anxiété liée aux données : un phénomène que les chercheurs appellent « orthosomnie ».

Une précision qui varie selon les marques

Les tests comparatifs permettent de dresser un tableau des performances moyennes selon les marques. L’Apple Watch arrive souvent en tête pour la fréquence cardiaque et le suivi général, mais reste sujette à erreur sur les calories. Les appareils Fitbit et Garmin montrent une bonne régularité dans le comptage des pas. Les marques comme WHOOP ou Oura, orientées « biohacking » ou récupération, proposent des indicateurs avancés (HRV, sommeil profond) mais dont la précision n’est pas toujours validée scientifiquement. En somme, il existe des différences notables entre les marques, mais aucune n’est parfaite sur tous les plans.

Utilisation médicale et limites éthiques

Les montres connectées intéressent de plus en plus le monde médical. Certaines sont capables de détecter des arythmies cardiaques, des chutes ou des signes précoces de fièvre. Pendant la pandémie de COVID-19, elles ont même été utilisées pour surveiller des variations de fréquence cardiaque ou de température. Cependant, ces outils ne sont pas reconnus comme dispositifs médicaux de diagnostic. Ils doivent donc être utilisés avec prudence, comme compléments d’information et non comme substituts à une évaluation clinique.

Par ailleurs, la dépendance aux chiffres peut avoir des effets psychologiques négatifs. L’obsession du score (sommeil, stress, calories…) peut altérer la relation au corps et au ressenti. Enfin, la question des données personnelles est cruciale : ces montres collectent des informations intimes, parfois partagées avec des tiers à des fins commerciales ou de recherche.

 

Conclusion : utiles pour progresser, mais pas infaillibles

Les montres connectées offrent une multitude de données qui peuvent aider à mieux se connaître, à améliorer sa santé ou à rester actif. Pour certaines mesures comme la fréquence cardiaque ou le nombre de pas, elles sont généralement fiables. En revanche, pour les calories brûlées ou l’analyse détaillée du sommeil, leur précision est encore insuffisante. L’essentiel est de considérer ces données comme des indicateurs de tendance, et non comme des vérités absolues. Elles peuvent guider… mais ne doivent jamais remplacer l’avis d’un professionnel ou l’écoute de son propre corps.