Le rôle méconnu des zooplanctons dans la lutte contre le réchauffement climatique
On parle souvent des forêts ou du phytoplancton pour leur capacité à absorber le carbone. Mais une nouvelle étude met en lumière un acteur discret et inattendu : le zooplancton de l’océan Austral. Grâce à ses migrations saisonnières, il stocke chaque année environ 65 millions de tonnes de carbone dans les profondeurs. Un phénomène encore largement absent des modèles climatiques.
Le “Seasonal Migrant Pump” : un mécanisme naturel étonnant
Ce terme désigne la migration verticale des zooplanctons — principalement les copépodes, le krill et les salpes — entre la surface et les profondeurs de l’océan Austral. En été, ils se nourrissent en surface. En hiver, ils descendent jusqu’à 500 à 1 000 mètres pour hiberner, se reproduire ou mourir.
Durant cette migration, une partie du carbone absorbé en surface est transportée en profondeur, où il est stocké à travers la respiration ou la décomposition des organismes. Contrairement à la pompe biologique classique qui repose sur les déchets organiques, ce mécanisme est actif et particulièrement efficace.
Chiffres clés : 65 millions de tonnes de carbone piégées par an
- 80 % du stockage est assuré par les mesozooplanctons, principalement les copépodes.
- 14 % sont dus au krill.
- 6 % proviennent des salpes.
Ces chiffres proviennent d’une modélisation basée sur plus d’un siècle de données biologiques et océanographiques. C’est la première fois que cette pompe migratoire est quantifiée à cette échelle.
Un mécanisme ignoré des modèles climatiques
Jusqu’à présent, les modèles de climat mondiaux n’intégraient pas ce phénomène, sous-estimant ainsi la capacité de l’océan Austral à capter le CO₂. En l’absence de ce processus, les prédictions de stockage de carbone sont incomplètes, ce qui nuit à la précision des projections climatiques.
Corriger ce biais est crucial pour mieux comprendre l’équilibre global du carbone et affiner les politiques climatiques.
Un rôle encore plus stratégique dans un climat changeant
Cette pompe migratoire a un autre atout : elle ne fait pas “fuir” les nutriments vers les profondeurs, contrairement aux sédiments organiques. Elle permet donc un stockage efficace du carbone tout en préservant la productivité biologique en surface.
Mais ce mécanisme est fragile. Le réchauffement, la surpêche du krill ou les perturbations des cycles planctoniques pourraient en réduire l’efficacité. Il est donc urgent d’intégrer ce levier naturel dans les stratégies de protection et d’atténuation du changement climatique.
Conclusion
Les zooplanctons de l’océan Austral, invisibles à l’œil nu, jouent un rôle de géants dans la régulation du climat. En migrant chaque année vers les profondeurs, ils séquestrent des quantités massives de carbone. Ce “service écosystémique” mérite d’être reconnu, protégé et intégré dans nos outils de modélisation et de décision.
Face à l’urgence climatique, chaque mécanisme naturel compte. Et parfois, les plus petits sont les plus puissants.